vendredi, mai 30, 2008

La junte birmane renforce son contrôle sur le pays
LE MONDE 27.05.08 15h22 • Mis à jour le 27.05.08 15h22

Tout en permettant aux expatriés des organisations non gouvernementales (ONG) étrangères, mardi 27 mai, de se rendre enfin dans les zones touchées, le 2 mai, par le typhon Nargis, la junte birmane resserre son étau sur le pays. Mardi, des dizaines d'hommes en uniforme et en civil ont pris position, à Rangoun, autour du domicile de l'opposante birmane, Prix Nobel de la paix, Aung San Suu Kyi, et devant le siège de son parti.
Selon la radio d'opposition birmane, Democratic Voice of Burma (DVB), hébergée en Norvège, treize personnes ont été arrêtées ces derniers jours. Elles souhaitaient manifester lors de la visite, vendredi, du secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, en Birmanie et avant la dernière phase, samedi, du référendum sur la nouvelle Constitution.
La pression sécuritaire vise également la région touchée par le typhon. Les autorités fouillent chaque véhicule qui franchit les barrages installés sur les routes menant au delta de l'Irrawaddy, zone de la catastrophe. Les policiers cherchent à bloquer tout infiltration d'Occidentaux non autorisés à se rendre sur place.
Dans l'ex-capitale de la Birmanie, Rangoun, la chasse aux faux touristes semble ouverte dans les hôtels et sur les sites historiques. Le régime veut limiter les témoignages rapportés par des journalistes entrés grâce à des visas touristiques. Les membres des ONG d'ailleurs s'abstiennent de tout contact avec les Occidentaux présents en Birmanie afin d'éviter toutes représailles.
La population civile est également soumise à des contrôles rigoureux. De nombreux Birmans des régions peu touchées par le désastre se rendent par leur propre moyens vers les zones sinistrées afin d'apporter de l'aide. Leurs véhicules sont fouillés en quête d'éléments attestant d'une activité subversive et le matériel d'aide en est souvent soustrait.
SOLDATS SANCTIONNÉS
"La priorité des gens est pourtant de manger et de boire, ils veulent survivre", rapporte Than Win Htut, un journaliste birman de la radio DVB. Selon ce média, des cas de choléra seraient apparus dans les zones touchées. Par peur de contamination, les survivants ne mangent plus de poisson, les enfants ont peur de toucher l'eau. Et les esprits sont encore occupés par la recherche des proches disparus.
Sur le sol de Rangoun, des marques, comme un "No", accompagné d'une croix, sont parmi les rares signes de protestation visibles. "Quelques jeunes faisaient une croix avec leurs bras, au-dessus de leurs têtes, pour dire qu'ils ne voulaient pas voter lors du référendum", ajoute M. Htut. DVB signale aussi la présence d'autres inscriptions sur le sol telles que : "Nous avons faim et soif. S'il vous plaît, sauvez les gens en détresse."
La junte s'efforce de limiter les contacts au sein même du pays entre le peuple et les moines, suspectés de tirer un profit politique de la catastrophe. Les monastères ont hébergé nombre de sans-abri et les moines se sont souvent substitués aux autorités pour secourir les victimes du typhon.
Des récits évoquent enfin des cas de jeunes soldats sanctionnés pour avoir voulu venir en aide aux sinistrés. "Beaucoup ont de la famille dans les zones dévastées, ils aimeraient aider mais leur hiérarchie les menace de représailles et les cantonne à la surveillance des contestataires", assure Khin Zin Minn, Birmane exilée dont l'époux coordonne la communauté birmane en France.
Jacques Follorou avec E. V. à Rangoun, Fella Adimi et Renate Krieger à Paris

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